L'armoire des robes oubliées - Riikka Pulkkinen
Alors que sa grand-mère Elsa se meurt d'un cancer foudroyant et que tous ses proches se rassemblent pour adoucir ses derniers jours, Anna découvre que, derrière le mariage apparemment heureux de ses grands-parents, se cache un drame qui a marqué à jamais tous les membres de sa famille.
Une vieille robe trouvée par hasard, et dont elle apprend qu'elle aurait appartenu à une certaine Eeva, va réveiller le passé. Cette Eeva, dont on ne lui a jamais parlé, aurait été, dans les années 60, la nourrice de sa mère. Mais Anna ne tarde pas à comprendre qu'elle a été beaucoup plus qu'une employée et que son grand-père, peintre célèbre, l'a profondément aimée...
J'avais ce titre, qui m'avait attirée par sa couverture, depuis un bon moment dans ma pal. Le challenge Un genre par mois d'Iluze, consacré en ce mois de janvier au roman contemporain, m'a donné l'occasion de le lire.
Je dois bien avouer que je suis déçue de ma lecture...
C'est un roman essentiellement féminin, qui promettait de découvrir trois générations de femmes : Elsa, la grand-mère, Ella, sa fille, Anna et Maria, ses petites-filles, ainsi qu'Eeva, qui fut la baby-sitter de la petite Ella lors des voyages professionnels d'Elsa. C'est un roman centré sur l'amour : maîtresse/amant, petite-fille/grand-parent, mère/fille, enfant/nounou, belle-mère/belle-fille...
On suit la majeure partie de l'histoire familiale par les yeux d'Anna, qui découvre une ancienne robe d'Eeva et décide de se pencher sur ce passé jusqu'alors tu par tous. On découvre que sa propre vie a des points communs avec celle d'Eeva. Et puis certains chapitres, de-ci de-là, nous ramènent dans les années 60, et nous font vivre l'histoire ancienne par la voix d'Eeva.
C'est joliment écrit, souvent imagé et globalement agréable à lire. Malgré le thème et une nostalgie parfois sous-jacente, le roman n'est pas parcouru du début à la fin par la tristesse ou le pathos, c'est tendre et sensible. Je pense notamment à la relation qui unit Anna à son grand-père, aux doutes qui assaillent Elsa à la veille de sa mort, lorsqu'elle se demande si elle a été une bonne mère, ou encore à la réaction d'Ella, médecin, qui doit affronter la disparition prochaine de sa mère.
Mais c'est aussi, parfois, un peu brouillon et le fil s'avère alors difficile à démêler. Ainsi, lorsque l'auteur parle de "la mère", en présence des trois générations, on peut penser qu'il s'agit d'Ella, pour ensuite découvrir que ce terme désignait en fait Elsa. A un autre moment, dans un chapitre se déroulant dans le passé, l'auteur emploie le prénom d'un personnage du présent; simple erreur, certes, mais qui perturbe la lecture pendant plusieurs pages, le temps de comprendre qu'il ne s'agit pas d'un effet de style mettant en parallèle passé et présent, mais d'une erreur de relecture.
A propos de ces flash-back, d'ailleurs, je suis assez dubitative : je n'ai pas compris d'où ils venaient. La narration est alors en "je", ce qui est rigoureusement impossible. On m'objectera peut-être que c'est un effet de style, ou une mauvaise traduction, ou que c'est pour faire joli, mais rien de tout ça ne suffira à faire passer cette impression d'artificialité, de manque de cohérence que ces chapitres m'ont laissée. D'un point de vue narratif, le procédé ne m'a pas convaincue. En outre, tout ce qui se passe après la fin de la liaison est passé sous silence. On ne sait rien de la reconstruction du couple, de la réaction ou des sentiments d'Ella, de la façon dont cela a pu influencer son caractère ou ses relations avec ses parents. Je suis clairement restée sur ma faim.
En bref, une très jolie écriture, mais une impression de lenteur, de longueur et un manque de précision qui m'ont fait rater le rendez-vous avec ce roman pourtant souvent apprécié, semble-t-il.