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Ce que Marguerite lit
11 juin 2015

A la mesure de nos silences - Sophie Loubière

silences

Jamais Antoine n'aurait pensé que son grand-père puisse agir ainsi : il y a quelques heures à peine, l'adolescent sortait du lycée, s'apprêtant royalement à rater son bac. Kidnappé par papi à bord d'un vieux coupé Volvo, il roule à présent vers l'inconnu, privé de son iPhone. [...] 

En guerre avec sa mère, en butte à une ex-petite-amie (un peu) frappée, Antoine est un ado en crise. Et ce n'est pas la perspective du bac qui pourra le remotiver, ce diplôme n'étant plus gage de réussite. C'est alors que son grand-père, qu'il voit à peine depuis des années, l'embarque à la sortie du lycée, et lui impose de passer 2 jours en sa compagnie, à l'issue desquels il lui signera un chèque alignant les zéros, sorte d'avance sur héritage qu'il pourra utiliser à sa guise. De quoi tenter le jeune homme, bien décidé à mordre (brièvement) sur sa chique pour empocher le magot, même si cette virée ne le tente que très moyennement. Les voici donc partis, eux qu'un gouffre sépare, qui se connaissent à peine et ne savent guère communiquer, direction le village d'enfance du papy. 

L'auteure alterne les chapitres au présent et au passé, ces derniers narrant la jeunesse de François, sous l'occupation. Elle nous emmène dans la petite commune de Villefranche-de-Rouergue, théâtre d'un fait historique dramatique et méconnu dont a été témoin le vieil homme et dont il est resté marqué. 

La plume oscille d'Antoine à François, du langage et des angoisses de l'un au phrasé et aux regrets de l'autre. Entre secrets, culpabilité et remords, c'est toute une vie qui se dessine peu à peu, au fil des kilomètres avalés par la vieille voiture de collection. 

Si j'ai trouvé que le tout était un peu convenu dans son traitement et -surtout- dans son happy end, si j'ai regretté le style parfois trop léché qui m'a souvent tenue à distance, j'ai par contre beaucoup aimé le fond de l'intrigue. C'est pour moi le point fort de ce roman : la découverte de cet épisode méconnu, oublié, que fut l'incorporation de musulmans bosniaques au sein de l'armée allemande, dont je n'avais absolument jamais entendu parler. En fait, je m'aperçois que j'aurais presque préféré un roman historique, qui me plonge totalement dans la période et les événements décrits, sans m'obliger à remonter à la surface régulièrement pour retrouver Antoine. Ce grand écart, plutôt réussi par ailleurs, ne m'a personnellement pas tout à fait convaincue. J'aurais, je pense, été plus enthousiaste si François s'était contenté de me raconter ses souvenirs, à moi, dans le creux de l'oreille, sans passer par son petit-fils. Ce petit-fils que j'ai longtemps considéré comme le maillon faible du roman, en proie à un sentiment d'énervement à son égard, même si -ouf- les clichés s'avèrent moins présents que ce que j'ai pu craindre au début de ma lecture. 

Cette première rencontre avec Sophie Loubière augure donc du bon pour la suite. Ce n'est qu'à titre tout à fait personnel que j'aurais ici préféré un roman uniquement historique.

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